L’Amérique traumatisée par le dopage

Le Jockey Club américain se devait de réagir après une longue série d’incidents et d’accidents qui ont entaché l’image sportive des courses hippiques outre-Atlantique. L’instauration dès le mois d’avril 2009 des « Retrospective Drug Tests » vise à redorer le blason des compétitions, à protéger les chevaux et à accentuer la chasse aux tricheurs. Explications…

Les passionnés du Turf sans frontière ont encore en mémoire l’accident mortel d’Eight Belles dans les Preakness Stakes ou encore les révélations sulfureuses sur les prises d’anabolisants de Big Brown à l’époque de sa tentative dans la Triple Couronne. Crédibilité oblige, les dirigeants des courses américaines devaient frapper un grand coup pour reprendre la main et remettre de l’ordre dans la maison…

Pas de pitié pour les tricheurs !

Avec la création d’une unité de longue conservation des prélèvements biologiques destinés à la lutte antidopage, le Jockey-Club américain s’inscrit clairement dans une démarche de chasse aux sorcières à l’encontre des tricheurs qui, jusqu’ici, avaient une longueur d’avance sur les scientifiques de la lutte antidopage. En transposant le problème dans le sport cycliste, on se souvient que des échantillons biologiques de Lance Armstrong avaient été testés positifs à l’EPO six ans après leur prélèvement, remettant en question l’intégrité du septuple vainqueur de la Grande Boucle. Désormais, aux U.S.A., les échantillons biologiques équins seront conservés afin de laisser le temps aux scientifiques de réexaminer certains cas au fil des progrès technologiques. Cet archivage permettra de confondre les tricheurs plusieurs années après un contrôle dans un premier temps négatif.

Entre éthique et juridique !

La mise en place d’une telle structure permettra d’accroître la pression sur les professionnels peu scrupuleux et d’accumuler des preuves et des circonstances aggravantes en cas de récidive de l’intéressé. Plus personne ne sera à l’abri du pire même plusieurs années après une grande victoire. Une fois passé l’enthousiasme suscité par le côté éthique garantissant une meilleure justice sportive des courses américaines et la protection des chevaux, il convient de penser aux revers de la médaille. Ceux qui risquent de profiter le plus de la mise en place des « Retrospective Drug Tests » sont certainement les avocats américains qui vont pouvoir s’en donner à cœur joie sur les thèmes des délais de prescription, de la rétroactivité, des vices de forme ainsi que sur les failles et les limites du système. Imaginez un peu les conséquences juridiques potentielles d’une disqualification tardive, 5 ans après, d’un vainqueur d’Arc de Triomphe, sur le volet financier de l’affaire (remboursement d’allocations colossales) comme sur le volet commercial avec les plaintes potentielles des éleveurs lésés, celles des propriétaires de parts d’étalons, sans parler des poursuites éventuelles de turfistes procéduriers…

Non merci pour la France !

Vous l’aurez compris, l’initiative du Jockey Club américain part d’une bonne intention mais elle devra être encadrée par des mesures juridiques adaptées sous peine d’être à l’origine d’imbroglios juridiques et financiers sans précédents. Côté français, les responsables de la politique antidopage dans le sport hippique maintiennent le cap avec plus de 23.000 prélèvements annuels et une règlementation claire et inébranlable rédigée noir sur blanc dans le Code des Courses. En France on joue à fond la carte de la prévention et du contrôle continu sans pour autant se montrer clément avec les tricheurs. Seule ombre au tableau, sur notre sol, la politique en place ne répond pas à deux questions que se posent tous les turfistes mais aussi certains professionnels : « Tous les produits illicites sont-ils recherchés dans les échantillons biologiques ? » « Certains tricheurs utilisent-ils des produits indétectables aujourd’hui sans risquer de se faire prendre parce qu’ils ont plusieurs longueurs d’avance sur les scientifiques de la lutte antidopage ? » Jusqu'à 600€ offerts pour parier sur les courses hippiques !

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