Trot Publié le mardi 10 février 2009 à 08h12

Lady d’Auvrecy à jamais dans la légende


Le 4 février dernier, Franck Harel a remmené Lady d’Auvrecy chez son éleveur Lambert Hue. Pour l’entraîneur, ce jour marque la fin d’une aventure, le point final d’une magnifique histoire qui a commencée en 2000 et qui aura fait vibrer la France hippique toute entière. Franck Harel a accepté de revenir sur la carrière de la belle blonde qui a remporté trois Groupe I et engrangé 1.431.470 euros de gains…

Portrait flash

Lady d’Auvrecy Né le 2 juin 1999 à Auvrecy Origines : Dorenzo et Everilda (Haut de Bellouet) Record : 1’10’’6 attelé à 8 ans sur piste homologuée Gains : 1 431 470 euros

Sous le charme de Dorenzo

« J’avais déjà entraîné la sœur aînée de Lady d’Auvrecy, Kajoline d’Auvrecy, et c’est tout naturellement que j’ai pris Lady au débourrage à 18 mois, d’autant plus qu’il s’agissait d’une fille de Dorenzo, un cheval avec lequel j’avais gagné en course. Je l’ai reprise au mois d’avril et qualifiée dès le mois de juin. Elle était petite, vite sur jambes, alors comme je n’avais pas un gros effectif, j’ai joué la carte de la précocité en la débutant à Caen au mois de septembre 2001, une tentative qui s’est soldée par une disqualification. J’ai alors choisi de la soigner d’un kyste à un boulet et de l’arrêter tout l’hiver. »

Les premiers signes de classe

L’année suivante, Franck Harel a poursuivi son travail avec patience tout en décelant très vite un gros potentiel chez son élève : "Tout au long de l’année 2002, Lady m’a montré des moyens, elle s’est baladée lors de ses victoires au mois de juin au Mans puis à Vincennes, sur la petite piste, au mois d’octobre. Lady n’a couru que 10 fois à 3 ans et elle ne courra que 12 fois à 4 ans. Au mois de mars 2003, j’ai confié ma pouliche à deux reprises à Pierre Levesque, qui me l’a menée sagement. Ensuite, l’année de 4 ans a été gérée avec sagesse, Lady s’imposant à deux reprises à Vincennes avec Sébastien Baude."

Une année de 5 ans exceptionnelle

« Au mois d’avril 2004, Lady s’est imposée en se tordant de rire sur les 2.700 mètres de la grande piste en marchant 1’14’’3. Là, j’ai compris que ma jument avait la pointure pour aller avec les bons et j’ai alors axé sa préparation sur le Critérium des 5 ans. Elle a battu Ladakh Jiel et Lontzac dans le Prix du Louvre, au mois de juillet, à Enghien avant de se classer deuxième de Jeanbat du Vivier dans le Prix de Buenos Aires, exceptionnellement disputé à Vincennes. Pour le Critérium, j’étais hyper confiant mais comme Lady d’Auvrecy dépendait d’une petite écurie de province, on a pris la candidature de « la blonde » un peu à la légère. On a perdu 30 mètres sur une faute en partant, là j’ai eu vraiment peur mais ma jument a finalement gagné de 20 mètres ; je pense qu’elle avait vraiment 50 mètres pour la gagner ! Après cette course, Lady est partie au champ pour se reposer. Lady était une jument nerveuse, proche du sang ; chez moi elle a toujours vécu dehors. »

Le rêve américain

A 6 ans, Lady d’Auvrecy allait encore réaliser une année somptueuse, la belle blonde était définitivement entrée dans la cour des grands ! « Lady a été éliminée dans le Prix d’Amérique 2005, alors nous sommes allés gagner le Prix de Brest. A ce moment là, il n’y a avait pas le Prix Ténor de Baune pour délivrer un visa pour l’Amérique ! Troisième du Prix de La Marne puis deuxième d’Ilster d’Espiens dans le Prix de l’Union Européenne, la jument a toujours répondu présent à chacune des courses visées. Elle était meilleure en courant rapprochée. Cette année là, elle a encore décroché plusieurs belles victoires dans le Prix Kerjacques, le Prix de La Manche, le Prix de Bruxelles et le Prix de Bretagne. Malheureusement, Lady m’a fait un coup de sang durant la préparation au Prix d’Amérique 2006 et j’ai dû tirer un trait sur le rêve américain… »

Une défaite qui vaut toutes les victoires !

« En 2006, après un bon début d’année, Lady avait très mal couru dans le Critérium de Vitesse d’Argentan. Trois jours avant le Prix Kerjacques, je l’ai alors travaillée durement ; elle volait ! Ce jour-là, elle allait battre Jag de Bellouet lorsqu’elle a échappé à la vigilance de Pierre-Yves Verva qui la connaissait mal. Pour moi, nous avions battu platoniquement Jag et cette disqualification avait un arrière goût de victoire. Lady a ensuite aligné les belles courses, deuxième du Prix des Ducs de Normandie, première du Prix Chambon P, troisième du Prix René Ballière (derrière Jardy et Mara Bourbon) pour préparer la victoire dans le Prix de New York, deuxième de Jag dans le Prix de Washington, troisième du Prix Jean-Luc Lagardère, première de la Finale de la Coupe du Monde de Trot 2006 à Kazan au Tatarstan et première du Prix d’Eté. Quelle année fantastique ! »

La course qui fait mal !

« Je me suis appliqué a préparé le meeting d’hiver 2006-2007 avec en point de mire l’Amérique. J’ai drivé moi-même la jument dans le Bretagne et le Bourbonnais. Nous lui avons donné une course un peu trop gentille dans la Clôture du GNT avant d’aller sur le Bourgogne puis le Belgique. La jument est arrivée en forme pour le Prix d’Amérique mais malheureusement, le scénario de course fut catastrophique et ma jument a pris très dur ce jour-là. Je crois qu’ensuite, elle n’a plus jamais été la même ! Lady a encore obtenu une ribambelle de belles places en 2007, elle a même su remporter le troisième Groupe I de sa carrière en enlevant le Grand Prix de Wallonie. Je voudrais tirer un coup de chapeau à Jean Pigache, le maréchal-ferrant de Lady qui a fait un fantastique travail avec les pieds de la jument. Elle courait ferrée et a toujours eu un souci devant, à gauche, son maréchal a su optimiser son potentiel. »

La fin de carrière

En grand professionnel, Franck Harel a tout tenté pour redonner une chance à sa championne, il a même essayé de lui mettre une selle sur le dos ; en vain. « Au mois de septembre 2007, quand Lady terminait sixième du Prix d’Eté, j’ai compris qu’elle ne pourrait plus jamais fournir une top-performance. Elle avait eu un parcours en or ce jour-là et quand elle a mis le nez à la fenêtre, au lieu de gicler elle a mis la tête de travers, je crois que ça voulait dire : « J’en ai assez ! ». Ensuite j’ai attendu le printemps 2008 pour tenter un come-back ; ma jument a toujours été meilleure au printemps ! J’ai fait un essai sous la selle à Graignes avant de définitivement abandonner l’idée de courir avec elle. »

La boucle est bouclée

En rendant Lady d’Auvrecy à son éleveur, Lambert Hue, un an avant la date officielle de sa fin de carrière sportive en France, Franck Harel prouve son respect pour sa jument. Lady d’Auvrecy sera saillie par Goetmals Wood ou Coktail Jet en 2009 (le nom de l'étalon n'est pas encore connu) et la suite d’un tel conte de fées voudrait que dans quelques années, Franck retrouve à l’entraînement un rejeton de sa « Belle Blonde » : « Elle était magnifique d’état lorsque je l’ai ramenée à son éleveur. Lady d'Auvrecy m’a permis de sortir de l’anonymat, de participer à de grandes courses et de côtoyer de grands professionnels. Les gains de course de Lady m’ont également permis d’investir dans des poulinières été d’améliorer les infrastructures de l’écurie. Avec mon épouse Christelle, nous lui souhaitons une heureuse retraite avec autant de bonheur qu'elle a pu nous en apporter...» Jusqu'à 600€ offerts pour parier sur les courses hippiques !